Dictionnaire juridique

DD

Définition Cession de Fonds de Commerce

La cession de fonds de commerce est une opération juridique complexe qui permet à un entrepreneur de transmettre l’ensemble des éléments corporels et incorporels nécessaires à l’exploitation de son activité commerciale.

Le fonds de commerce est, en effet, en lui-même une universalité juridique faisant référence à l’ensemble des éléments corporels (stocks de marchandises, matériel, outils, véhicules…) et incorporels (clientèle, enseigne, droit au bail, achalandage…) nécessaires à l’exploitation de l’entreprise.

Les étapes clés d’une cession de fonds de commerce

L’opération de cession de fonds de commerce doit essentiellement suivre les étapes suivantes :

Évaluer la valeur du fonds de commerce et de la plus-value potentielle avant cession

Étape préalable à la cession, les parties doivent tout d’abord se mettre d’accord sur le prix. À cet égard, il existe plusieurs méthodes de valorisation du fonds de commerce.

La méthode dite des barèmes et des coefficients multiplicateurs

C’est la méthode le plus souvent retenue par l’Administration fiscale. Elle consiste à retenir un coefficient multiplicateur, variable selon le secteur d’activité, appliqué au chiffre d’affaires du fonds  (en général hors taxe). Le barème le plus connu est celui édité par le Mémento pratique des Évaluations des Éditions Francis Lefebvre

La valorisation en fonction de la rentabilité du fonds et l’EBE

C’est la méthode le plus souvent retenue par les banques, dans la mesure où elle permet d’évaluer la capacité de remboursement de l’entreprise, en s’intéressant essentiellement à son résultat d’exploitation (EBE : excédent brut d’exploitation).

La méthode comparative et autres approches d’évaluation

On peut citer encore :

  • La méthode par comparaison, consistant à valoriser le fonds de commerce en le comparant aux prix d’affaires similaires à vendre à proximité et à des cessions comparables récentes ;
  • La méthode de la correction par actif net, consistant à valoriser l’entreprise sur la base de la valeur réelle de son patrimoine (licence, machines, stock, créances…), minorée de la valeur réelle de ses dettes.

Dans tous les cas, il est conseillé d’utiliser plusieurs de ces méthodes, afin de pouvoir les analyser et de comparer leurs résultats pour retenir un chiffre moyen. 

Calcul et optimisation de la plus-value de cession

La plus-value de cession correspond à la différence entre la valeur de vente du fonds et sa valeur d’acquisition (ou valeur nette comptable), déduction faite des amortissements éventuels. Cette plus-value sera soumise à l’impôt sur le revenu selon différents régimes possibles, variant notamment en fonction de la durée de détention du fonds et du statut juridique du cédant (entreprise individuelle ou société). Une analyse préalable de cette plus-value et des options d’optimisation fiscale disponibles (comme les dispositifs d’exonération pour départ à la retraite) est fortement recommandée avant toute cession.

Sur ce point, voir notre article :

Rédiger les actes : la promesse ou le compromis de vente, suivi de l’acte définitif

Après s’être mises d’accord entre elles sur le prix de cession, les parties vont devoir formaliser leur accord, en principe à travers deux actes successifs : la promesse (ou compromis) de vente, puis, si tout se passe comme prévu, l’acte définitif de vente. 

Une attention particulière devra notamment être portée aux éléments suivants :

Purge préalable des droits de préemption : les parties veilleront notamment à conditionner la cession à la purge préalable d’éventuels droits de préemption applicables (on pense notamment au droit de préemption des communes prévu par les articles L. 214-1 et suivants du Code de l’urbanisme, ou encore à l’éventuel pacte de préférence que pourrait renfermer le bail au profit du bailleur).

Si tel est le cas, avant la cession, les parties devront interroger les différents bénéficiaires de ses droits, afin de s’assurer qu’ils n’entendent pas s’en prévaloir. À défaut, les parties s’exposent à ce que l’opération de cession soit frappée de nullité.

Information préalable des salariés : s’il existe des salariés, les parties devront s’être assurées de les avoir préalablement informés du projet de cession, conformément aux articles L. 141-23 et suivants du Code de commerce.

Cette obligation d’information préalable s’applique pour toutes les entreprises de moins de 249 salariés. En cas de manquement à cette obligation d’information, une action en responsabilité peut être engagée, le cédant encourant une amende civile dont le montant peut atteindre 2% du montant de la vente. 

Éventuelles clauses liées au financement : dernier point d’attention particulière, si l’acquéreur entend financer l’opération d’acquisition par un crédit bancaire, les parties devront, au stade de la promesse, conditionner l’opération à l’obtention du crédit nécessaire. À cet égard, les parties veilleront à bien encadrer la clause (montant du crédit sollicité, durée de l’emprunt, etc.) afin d’éviter tout risque de contentieux à ce sujet dans l’hypothèse où l’acquéreur se verrait refuser le concours bancaire nécessaire.

Suivre les formalités postérieures à la promesse

Une fois la promesse de vente signée, les parties veilleront à effectuer un certain nombre de formalités, si nécessaire, telles que :

La purge préalable du droit de préemption communal

Comme on l’a vu, si un droit de préemption de la commune est applicable, le cédant devra « purger ce droit » préalablement à la réalisation de l’acte définitif de vente.

Pour ce faire, le cédant devra adresser à la commune concernée le projet d’acte de cession et le bail commercial accompagné d’un formulaire remis en 4 exemplaires, soit par lettre recommandée avec avis de réception, soit par dépôt en mairie contre récépissé. Le formulaire est disponible sur le site Service-Public.fr (https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/R18601).

À réception, le maire ou son délégataire disposent de 2 mois pour préempter. Le silence de la commune équivaut à une renonciation.

Dans ce délai, le maire (ou son délégataire) notifie :

  • soit sa décision d’acquérir aux prix et conditions de la déclaration, l’accord entre les parties est parfait et la vente peut avoir lieu ;
  • soit son offre d’acquérir aux prix et conditions fixés par le juge de l’expropriation ;
  • soit sa décision de renoncer à préempter.

Le silence de la mairie à l’issue de ce délai équivaut à renonciation à l’exercice du droit de préemption et le cédant peut alors réaliser la vente au prix et conditions mentionnées dans sa déclaration.

À noter : la mairie de Paris n’a pas fait application de cette possibilité à ce jour. Il n’existe donc pour le moment pas de droit de préemption des communes à Paris, comme il est toujours indiqué sur le site internet de la ville : https://www.paris.fr/pages/mutation-immobiliere-3548

La notification de la cession au bailleur si nécessaire

Le bailleur ne peut pas interdire la cession du bail dans le cadre d’une cession de fonds de commerce. Il s’agit d’une règle d’ordre public prévue par l’article L. 145-16 du Code de commerce :

« Sont également réputées non écrites, quelle qu’en soit la forme, les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail ou les droits qu’il tient du présent chapitre à l’acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise ».

C’est l’une des différences majeures entre la cession de fonds de commerce et la cession de droit au bail, puisqu’il est en revanche possible pour le bailleur d’interdire la cession isolée du bail.

S’il ne peut pas interdire la cession du fonds de commerce, le bail peut toutefois contenir des clauses restreignant cette liberté de cession en imposant, par exemple, l’agrément préalable du bailleur, le plus souvent au regard de critères de solvabilité ou d’honorabilité du cessionnaire. De telles clauses sont licites et admises par la jurisprudence.

Si elles existent dans le bail, il conviendra en conséquence de conditionner la promesse de cession de fonds de commerce à l’obtention de l’accord préalable du bailleur et de notifier au bailleur, postérieurement à la signature de la promesse, le projet de cession en lui demandant d’agréer le repreneur. Le plus souvent, on adressera au bailleur les documents comptables et les éléments financiers du repreneur (ses bilans, son business plan, etc.) afin de lui permettre de se prononcer.

A fortiori, cette notification préalable au bailleur s’imposera d’autant plus si le projet de cession de fonds de commerce implique une déspécialisation partielle du bail (par exemple, pour passer de l’activité de « petite restauration » à « restauration », pour autoriser l’exploitation d’une licence IV, etc). 

En général, on sollicitera également le bailleur afin d’obtenir un engagement de sa part en vue du renouvellement du bail commercial aux mêmes charges et conditions, si la cession de fonds de commerce porte sur un bail venant prochainement à expiration.

L’enregistrement de la promesse de vente en cas de promesse unilatérale

Le plus souvent, les promesses de vente de fonds de commerce sont dites « synallagmatiques », c’est-à-dire qu’elles engagent les deux parties : le vendeur est obligé de vendre si les conditions suspensives sont levées, l’acheteur sera, lui, obligé d’acheter. 

Toutefois, il arrive que les parties préfèrent recourir à une promesse unilatérale : le vendeur sera seul tenu de vendre, l’acquéreur disposera lui d’une option (en contrepartie du paiement d’une indemnité d’immobilisation).

Les promesses unilatérales sont évidemment valables. Cependant, si elles ne sont pas passées par acte notarié, elles doivent être enregistrées dans les 10 jours de leur signature à peine de nullité, en application de l’article 1589-2 du Code civil.

Les obligations post-cession pour l’acquéreur et le cédant 

Une fois l’acte définitif de vente signé, les formalités liées à la cession du fonds de commerce sont nombreuses. Elles diffèrent selon la partie en cause, acquéreur ou cédant.

L’enregistrement et le paiement des droits

Côté acquéreur : l’acquéreur sera tenu d’enregistrer la cession et de payer les droits d’enregistrement, dans un délai d’un mois à partir de la date de l’acte de cession, ou de la date d’entrée en possession du fonds si celle-ci est antérieure à la date de l’acte.

Les montants des droits d’enregistrement sont les suivants : exonération jusqu’à 23 000 euros, 3 % sur la tranche de 23 000 à 200 000 euros, puis 5 % au-delà de 200 000 euros. 

Côté cédant : ce dernier devra clôturer ses comptes, procéder aux déclarations fiscales afférentes (chiffre d’affaires, TVA, etc.) tout en prévoyant la répartition des obligations fiscales, et, s’il arrête son activité, demander sa radiation auprès du Centre de Formalités des Entreprises (CFE). 

Les publications légales obligatoires

La cession doit également faire l’objet d’un certain nombre de publicités destinées à informer les tiers et garantir les droits des créanciers.

Elle doit ainsi être publiée dans un journal d’annonces légales, à l’initiative de l’acquéreur, dans les 15 jours de l’acte de cession.

L’acquéreur doit par ailleurs se rapprocher du greffe du tribunal de commerce, dans un délai de 3 jours, afin que celui-ci procède à la publication d’un avis au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC).

Cette publication fait courir un délai de dix jours pendant lequel les créanciers peuvent faire opposition.

Les aspects fiscaux et sécurisation de la cession de fonds de commerce

La période de solidarité fiscale entre vendeur et acquéreur

En vertu de l’article 1684-1 du Code général des Impôts, l’acquéreur d’un fonds de commerce est responsable solidairement avec le vendeur du paiement de l’impôt sur le revenu afférent aux bénéfices réalisés par ce dernier pendant l’année de l’exercice de la cession, ainsi qu’aux bénéfices de l’exercice précédent. Cette solidarité s’applique également à l’impôt sur les sociétés et à la taxe d’apprentissage.

La durée de la solidarité fiscale de l’acquéreur avec le vendeur du fonds de commerce est en principe de 90 jours, mais peut être réduite à 30 jours lorsque les conditions suivantes sont réunies :

  • l’avis de cession du fonds de commerce a été adressé à l’administration fiscale dans les 45 jours suivant la publication de la vente au journal d’annonces légales ;
  • la déclaration des résultats a été déposée dans les 60 jours suivant la publication de la vente au journal d’annonces légales ;
  • au dernier jour du mois qui précède la vente, le vendeur est à jour de ses obligations fiscales déclaratives et de paiement.

Le séquestre du prix de vente : durée et modalités

Afin que l’acquéreur ne prenne aucun risque dans le cadre de l’achat d’un fonds de commerce, il est impératif de séquestrer le prix de vente durant toute la période de cette solidarité fiscale.

Le séquestre sera le plus souvent réalisé par un avocat ou un notaire, lequel engage sa responsabilité civile professionnelle pour cette mission. La durée de blocage des fonds et les modalités de la mission du séquestre doivent être précisées dans le contrat de cession.

Questions fréquentes sur la cession de fonds de commerce

Quelle est la différence entre cession de fonds de commerce et cession de parts sociales ?

Contrairement à la cession de parts sociales qui transfère la propriété d’une société avec son actif et son passif, la cession de fonds de commerce ne concerne que les éléments d’exploitation de l’activité commerciale. L’acquéreur d’un fonds n’est pas tenu des dettes antérieures du cédant (hors exceptions comme la solidarité fiscale temporaire), tandis que l’acquéreur de parts sociales reprend l’intégralité du passif social.

Le bail commercial peut-il bloquer une cession de fonds de commerce ?

Non, le bailleur ne peut pas interdire la cession du bail dans le cadre d’une cession de fonds de commerce. C’est une règle d’ordre public prévue par l’article L. 145-16 du Code de commerce. Toutefois, le bail peut contenir des clauses d’agrément imposant certaines conditions au cessionnaire, notamment en termes de solvabilité ou d’honorabilité.

Comment sont calculés les droits d’enregistrement lors d’une cession ?

Les droits d’enregistrement suivent un barème progressif : exonération jusqu’à 23 000 €, 3 % sur la tranche entre 23 000 € et 200 000 €, puis 5 % au-delà de 200 000 €. Ils doivent être acquittés par l’acquéreur dans le mois suivant la signature de l’acte ou l’entrée en possession du fonds.

Pour aller plus loin sur ce point, consultez également nos autres articles :

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